

Cette fois, j’ai eu à ma consultation, une enfant de cinq ans en difficulté scolaire.
Elle avait un comportement anormal en classe, ne répondait pas à l’appel de son nom ni à toute interpellation.
Reléguée au dernier pupitre par son institutrice impatiente, elle se tenait à l’écart effacée et calme, se mouvant de droite à gauche, en avant et en arrière émettant uniquement de sourds grognements presque inaudibles
rappelant un fauve brutalement sorti de cage et ahuri par les lumières.
La mise en quarantaine ne seyant plus à son institutrice, elle me fût adressée pour état d’autisme.
Perplexe ou complice, je n’ai pu pendant quelques brefs instants soutenir le regard de cette petite fille en souffrance et gifler la maîtresse de sa cruauté crevante.
Complice parce que la stabilité dont nous nous couvons nous est chère…
Complice parce que nous avons peur de déranger les coutumes..
Complice parce que nous prenons vite l’habitude des injustices sociales ou peut-être encore parce que j’ai été tenue par des raisons familiales à cette maîtresse qui a été en même temps celle de mon fils.
Une de ses paroles me revient encore lorsqu’elle me chuchota en confidente de passage que la petite pissait en classe, mordait les élèves et n’arrêtait pas de se mouvoir dans un mouvement pendulaire des plus exaspérants pour ses nerfs. L’enfant la mettait mal à l’aise et la terrifiait avec ses yeux perçants et surtout son silence. En un mot, elle la détestait et l’enfant le savait.
S’acharner sur l’enfant n’est que malheureusement très possible mais sur l’adulte reste encore carrément inconcevable surtout s’il s’agit du détenteur de l’instruction et du savoir. La majorité des parents préfèrent s’abstenir et être au petits soins de l’instituteur car le contrarier peut se révéler décisif voire nocif pour l’avenir de leur progéniture.
Je ne puis encore me pardonner mon silence, quoique de quelques instants , sur ce raid de méchanceté et de cruauté humaine ...
où le bulldozer continue à s’attaquer
en toute liberté et dans l’impunité
au moustique et au désarmé
et impardonnablement à l’enfant .
Fort heureusement, mon errance dans les couloirs de la vie n’a point permis à la lâcheté de longtemps me bâillonner et la décision de me dresser contre cette institutrice et ses semblables a germé instantanéent, fulgurante presque en dehors de ma volonté.
Les premieres minutes de doute évaporé, j’ai adressé la petite fille en consultation de pédopsychiatrie qui a achevé de concrétiser mon malaise vis à vis de la maîtresse et non de l’enfant.
La spécialiste ayant vite écarté le diagnostic d’autiste, elle a confirmé le manque de sécurité de l’enfant dans sa classe avec son institutrice. L’enfant a été en permanence, malheureuse dans ce cadre.
Les rapports de force étant inéquitable, l’enfant s’est réfugiée dans cet état paranormal pour se substituer aux agressions répétées et multiples de l’adulte dans une intelligence remarquable.
Autodéfense judicieuse lorsque la conception de la liberté d’expression et la franchise est étriquée et souvent mal venue.
J’ai décidé alors d’agir rapidement et après consultation parentale, l’enfant a été retirée de sa classe afin de la substituer à ce milieu devenu dangereuxf.
Des échos réconfortants me sont parvenus par la suite. Elle a eu de bons résultats scolaires et a repris goût aux études, à la parole, aux jeux et surtout à son enfance.
Je vous avoue aujourd’hui
que ce n’est point d’une lecture de marc qu’il s’agit
mais bel et bien d’une page dans l’agenda d’un vrai médecin scolaire….