samedi 4 avril 2009

Les malheurs de Margot

IL est des matins qui ne se lèvent que sur de la nuit.
Margot n'eut droit pendant très longtemps qu'à de la nuit.
Catapultée par dessus une falaise d'actes irréparables,
aspirée par un abîme d'indécence et de crimes honteux sur son corps à peine devenu femme, elle se soustrayait au désordre des choses en se jetant dans la nuit et ses pénombres ranimée par son nouveau compagnon qui l'accompagna sa vie durant: l'alcool.
Lorsqu'elle entamait sa bouteille et qu'elle tournait le T.S.F sur la radio orient et qu'elle écoutait la Sayeda Om Khaltoum, c'est comme si on soulevait la trappe sous laquelle elle gisait et qu'on laissait pénétrer un peu de lumière dans sa nuit.
Une bouffée d'air frais dans un foutoir pouilleux et nauséabond.
Il lui suffisait de l'écouter pour faire le vide dans ses malheurs sans ces deux là, elle ne se sentait plus capable d'avancer,
de survivre au geste de trop.
Margot accosta sur le rivage de ses dix sept ans toujours aussi fatale, aussi droite qu'un chêne que la tornade n'arriva point à casser.
Elle pliait certes sous le vent,
sous les coups de son amant qui devenait de plus en plus violent et envahissant,
sous les appels surtout du sang qui torrentait son corps et son cerveau lui rappelant à chaque seconde les visages aimés qu'elle avait quittés il y avait si longtemps.
Sa préférée Marcelle lui manquait terriblement et ne plus la border le soir, se moucher dans ses cheveux dans son corps si frêle et si effacée la rendait presque folle de chagrin.
La toute dernière Nicolle sans lui souhaiter de mal comme dirait tout juif consciencieux lui importait peu ...
Elle rechignait même à la prendre dans ses bras ou la langer car elle dégageait un air qui lui rappelait trop de choses douloureuses.
Par certains jours, malgré elle, elle se trouvait à la détester, à vouloir sa mort pour ne plus la voir et se rappeler qu'elle était la fille du beau-père incestueux, son violeur qui continuait à l'entretenir en même temps que sa mère .

Il est des portes lorsqu'elles se referment sur une douleur se scellent à jamais.
Sa douleur devenait par moment tellement insupportable que ni l'alcool ni sa Diva n'arrivaient à anesthésier.
Dés lors, elle fomenta un plan pour fuguer.
Mais où aller ?
Où aller lorsque nos erreurs nous rattrapent toujours ?
Où aller lorsqu'on est femme sans grand gage ni soutien?
La chair fraîche attire inexorablement les vautours.
Elle en était une et son prédateur fût cette fois-ci un maquereau qui possédait dans le sud du pays, une maison close .
Elle serait loin , très loin pour être retrouvée.
C'était selon elle, la seule façon de ramasser un peu d'argent et d'aider sa famille mais surtout pour se couper de l'enfer.
Fuir son tortionnaire qui avait de plus en plus d'emprise sur elle .
Alléger sa conscience,
endormir ses démons qui hantaient son sommeil et son éveil,
ses jours et ses nuits
parce qu'elle avait transgressait toutes les lois divines,
parce qu'elle avait copulé avec l'interdit.
C'est ainsi que Margot fit son entrée dans un bordel de renommée.

9 commentaires:

  1. C'est souvent la fin tragique de filles qui ont été abusé, elle ne se respecte plus. Que c'est triste.

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  2. Il ne s'agit même pas de respect car cela relève de la pathologie où il y intrication et confusion émotionnelle avec un sourd sentiment de culpabilité qui tâche tout.

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  3. Margot continue sur son voyage vers l'enfer et j'espère qu'elle pourra un jour prendre sa revanche sur une vie miséreuse. Elle arrivera peut être à prendre sa revanche sur la gente masculine qui la domine aujourd'hui, en tout cas c'est ce que je lui souhaite
    Bonne soirée

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  4. je reviens pour te dire que je t'ai taguèe dans un tag facile et sans risque , alors à toi de continuer
    Bisous

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  5. Ma très chère Lilia,
    A chaque fois que tu passes par chez-moi , tu laisses un parfum doux d'humanité, un parfum qui touche mon coeur , mon esprit et tous mes sens!

    Le baiser que tu m'as laissé a adouci cette tristesse qui s'est installée dans mon coeur!
    Qu'il est pénible , pour nous pauvres mortels, de nous sentir "impuissants" devant certaines calamités (humaines ou fatales)!!

    On a envie parfois, pour nous sentir moins mal, d'avoir un coupable! Si nous l'avons, par chance ou par malchance, nous voulons le culpabiliser! Nous voulons qu'il souffre comme nous souffrons!

    La SAGESSE voudrait qu'on laisse cet esprit de" culpabilisation" et de s'en remettre à Dieu!
    Il est seul maître de notre destin!

    Merci , ma chère Lilia , te lire m'a fait beaucoup de bien!
    Gros ,Gros bisous de TUNISIE!!

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  6. Quelle destinée hallucinante.
    J'ai connu, pour ma part, l'envers du miroir, le côté criminel.
    Artiste intervenant dans un Centre de détention, pendant 6 ans, j'ai connu des hommes ayant commis les pires crimes. Condamnés à de lourdes peines,certains étaient emprisonnés depuis plus de 30 ans et d'autres, purgeaient une perpétuité. J'ai entendu des récits que je peux même pas restituer ici.
    A l'époque,j'ai arrêté en 2008, je travaillais en binôme avec une psychologue et bien que soignant, puis qu'art-thérapeute,formé à l'écoute, je ressortais, assommé par ces confidence criminelles. Ce que nous avons entendu de ces hommes, nous éclaira sur la barbarie de l'être humain. Nous en parlions en débriefing ( notre groupe comptait 7 personnes ) mais cela restait difficile à "digérer".
    Difficile aussi d'imaginer que le " décrit" avait été le " vécu". Nous avions décidé de descendre dans l'enfer des damnés de la terre...pour les aider, malgré tous leurs crimes.Je vous laisse imaginer de ce que j'ai entendu de mes proches, de mes amis. Un tel engagement vous éloigne de beaucoup de monde.
    Nous ne les excusions de rien, ni oubliions ce qu'ils voulaient bien nous confier. Nous ne refaisions pas leur procès. Nous étions, encore frères sur le plan humain et cette fraternité pouvait, dans certains cas, les sauver.
    Nous avons fait notre propre chemin, nous les avons accompagné, aidé tout en comprenant que chaque être humain pouvait en faire autant en matière criminelle, sans pour autant,en faire autant, Dieu merci.
    Nos projets culturels ont permis à un très petit nombre, sur les 430 détenus, de retrouver le chemin,si éloigné, de la dignité, et d'une reconstruction possible de leur personne,pour envisager, un jour, une vie, dehors, dans la société qui les avait condamnés.
    Certains, en fin de peine, nous ont prouvé, après leur libération, que c'était possible et s'en tirent pas mal dans vie. D'autres ont stagné ou sont retombés.
    Je vous fais ce témoignage pour cautionner votre récit de vie, très juste, très vrai. La vie n'est pas simple, surtout quand on est une femme. Je suis le papa d'une grande fille de 34 ans bientôt, et j'ai souvent pensé à ce qui pouvait lui arriver dans les quartiers difficiles où nous l'avions élevée lorsqu'elle était jeune. Sa meilleure amie, Leila, était Algérienne, et comme nous, étrangère au pays.Fort heureusement, elle s'en est bien tirée,notre Fanny, mais ce ne fût pas le cas de tout le monde.

    Je suis très intéressé par vos sujets d'écriture, et par l'angle sous lequel vous nous les donnez à lire.
    Merci pour cela.
    Roger Dautais

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  7. comme c gentil ce que vous écrivez
    lorsque je vous lu chez Marie, j'ai tout de suie compris que vous avez eu un parcours intense et que vos écrits sont remplis d'un grand humanisme vous l'ai-je déjà dit?
    vous vous dîtes étranger au pays(je suppose la France) mais je vous trouve très ouvert sur les autres en autre le mien comme si vous étiez son enfant ....
    Suis -je dans l'erreur?
    EN TOUS LES CAS NATIF OU ADOPTIF,je vous le mets à vos pieds ainsi qu'à votre gentille petite famille pour le fouler à nouveau et vous ressourcer..
    ENCORE MERCI

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  8. Comme on peut se sentir sotte et égoïste ...
    un récit qui fait presque trop mal...
    une douleur qu'il faut intégrer pour y discerner le courage de Margot...
    tu me laisses sans voix Lilia et c'est bien ainsi...

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