dimanche 25 octobre 2009



Me revoilà écrire de Nouakchott..
Pour mes yeux non encore lavés des derniers vestiges de mon pays à l'occident,je suis au cœur de l'Afrique sans réaliser que nous appartenons au même continent.
Tout me renvoie à la différence, aux grands écarts de civilisation, de culture.
La mienne semble moderne, standardisée, presque bâtarde et sans grande surprise.
Les femmes sont chez moi comme un peu partout frappées au même moule.
Même hobbies, même préoccupations, même modèles de vie ou presque.
Même vie de chienne pour la plupart même vie de galère je dirai presque.
Des femmes qui courent du matin au soir, travaillent, préparent les enfants à l'école, cuisinent, mettent des machines, asticotent, fument, aiment entre deux pauses , font l'amour sans beaucoup de cœur, têtes et jambes prises trop souvent ailleurs....
Je ne suis point amère et ne me veux point paraitre vulgaire mais je vous invite tous à emprunter mes nouveaux yeux et de partir avec moi ici en éclaireur... en Mauritanie
Un monde à part la Mauritanie.
Un désert à perte de vue,
Sable et mouvances.
Grosses chaleurs, vents de sable.
Ville à part sortie du ventre de nulle part qui bat à son propre rythme.
Tout prête au déboussolement.
Presque un cri de dégoût devant ces maisons presque en tôle aux allures sales , ces autres plus belles plus rares qui griffent le ciel couleur sahara de cet immense pays. Les rues sont sales, lézardées de crottes de bêtes et d'humains.
Le désert est couleur des murs, des rues, des voitures,des mouches collantes, des moustiques qui mordent jusqu'à l'os, des bruits, des.... de tout .
C'est presque l'enfer si on se ferme dans notre carcan de gens venus d'un endroit meilleur.
Je me lève comme à mon habitude très tôt le matin, aux premières lueurs de l'aube. Juste à un chant ami dont je suis vainement amoureuse.
Ici aussi, il me tire de ma couche non encore tiédie par mes courtes nuits.
Ici, il n'est plus très seul mais il s'accompagne de bruits des plus inconfortables pour mes tympans de citadine venue d'ailleurs: chèvres têtues qui n'arrêtent pas de hurler, hennissements de leurs voisins juste à côté.
Les ânes circulent librement sans corde la nuit et le jour.J'arrive à croire qu'ils ont leur propre itinéraire et pas de proprio.
Je suis alerte aux moindres bruits, au moindre souffle surtout des blattes qui circulent aussi sans grande gêne.
Mes bêtes noires, tyrannes de mes veilles de petite enfant encore pisseuse dans son lit et aujourd'hui encore de la femme instruite que je suis.
Le médecin que je suis, répètera savamment comme mes confrères à la con :
phobie et maux d'enfance....
Ici, ça n'existe pas.
Le cafard, on ne l'écrase même pas.
Il ne les fait pas hurler pauvre que je suis mais ils vivent ensemble en colocation libres et sans incident.Il y a de la place pour tous.
La misère colore presque tout: le sol; le ciel et les corps: des enfants noirs à la peaux très brûlées , des mouches sur les crottes-narines, haillons en guise d'habits, des cheveux malpeignés, des ventres qui bombent comme dans le marasme mais des yeux qui brillent de vie!
je dirai de bonheur .
ici rien n'est très compliqué.
tout est plat sans vent.
j'ai vu des voitures que retardait en file devant moi la voiture qui me transportait.
des minutes longue comme une vie sous ce soleil tapant, un feu qui vire cinq fois et plus et pas un klaxon. Le chauffeur était descendu au beau milieu de la circulation régler une affaire urgente que seuls messieurs les hommes de notre monde civilisé se permettent de faire.
Ici hommes, femmes et enfants n'objectent avec les besoins de la nature...
OH la honte ,j'entends dire...
DONC PAS UN KLAXON
Pas une contestation
Pas de nerf à fleur de peau
Pas de prise de tête devant ce guichet de ministère qui à onze heures n'ouvre toujours pas ou mollement très mollement.
Oui, tout la Mauritanie bat à un rythme out off grande civilisation, grands airs et grandes commodités. On parle de zéro stress et s'il m'amuse d'étudier les pathologies mentales type dépression, suicide dans ce bled , je noterai certainement un nombre infiniment inférieur à celui que connaît nos sociétés tellement avancées.
Je crois bien que les antidépresseurs, les neuroleptiques et les sédatifs n'ont pas de marché ici et que le mauritanien ignore tout de leur existence et leur nécessité.
Le ministrable, l'esclave et le patron s'agenouillent admirablement par terre sans chichi et mangent sans grande toilette dans leurs mains.
Un rythme impossible à mes yeux convertis depuis des siècles aux langage de l'occident.
Je suis toute remuée.
Je décline cette tasse de thé que m'offre royalement un hôte de passage.
Notre homme est grand fort , parle comme à la manière de son peuple soit simplement et très doucement.Il est plutôt clair couleur café miel .
Nous avons pris l'avion ensemble du Maroc à l'escale.J'appris plus tard qu'il appartenait à la tribu des maures don la noblesse.
Notre boing a attéri tard et je l'ai déjà dit. Personne à m'attendre.
Ni chauffeur de l'hôtel ni personne.
Je panique .
Une crampe commence à se mettre en route devant le tableau sordide qui s'offre à moi dès la descente de l'avion.
Deux femmes au cœur de l'Afrique parce qu'en plus nous les tunisiens très ouverts au monde extérieur : l'occident , nous nous écartelons dans nos convictions du reste de l'Afrique.
NOUS nous croyons supérieurs, plus modernes, instruits ect....
Donc, je me voyais mal partie lorsqu'une voix déjà entendue m'interpelle. C'est l'homme de tout à l'heure dans la navette de l'hôtel.
Il propose gentillement de nous prendre à notre hôtel.
Deux personnes en costumes lui emboîtaient dans un léger décalage le pas.Il les pria dans sa langue de nous débarasser de nos valises jusqu'à sa voiture .Un cortège de voiture.C'était le premier ministre du pays.Je refuse encore poliment et décide d'attendre une connaissance mais je n'avais pas de puce locale .Il se charge d'appeler et se propose de rester à attendre avec nous seuls dans l'aéroport vidé de ses passagers, des transporteurs aussi insistants qu'une nuée de mouches collantes.Nous sommes dehors car il fait très chaud.Je prends place sur un semblant de banc crasseux.Il s'assoit à côté pour nous accompagner jusqu'à l'arrivée de notre parent.
Je sais que j'ai encore une tête qui plaît, la jeune fille avec moi encore plus mais notre homme était là non pas comme prédateur ou courtisan mais parcequ'il reste dans ce peuple une avenance, un sens aigu de l'hospitalité jamais vu ailleurs. Une simplicité hors temps.
La femme est reine dans son pays. Elle jouit de son statut social.Ses paroles sont vénérées, ses gestes aussi. L'homme se plie aux volontés de sa femme.Elle est choyée, gâtée et flane à longueur de journées dans son royaume sans obligation de tâches ou de corvée. Son mâle se charge de tout..Et si par malchance le couple tourne mal, elle ne fait que s'énorguiller d'un tel échec. Ses amoureux n'en seraient que plus nombreux à sa cour.
Pour toutes ces raisons, notre ministre assure son protocole avec un tact , un raffinement et une gentillesse spontanée propre à ce peuple bédouin.
Rare comportement chez nos civilisés.
Mais à chacun ses convenances.
Je pense que je vais m'arrêter pour préparer ma leçon pour demain.
Demain ou plus tard , je vous livrerai encore Nouakchott et ses secrets!

8 commentaires:

  1. Lilia, tu dis : "Je vous invite tous à emprunter mes nouveaux yeux..."
    Quelle belle expression que voilà: prêter ses yeux pour faire voir le monde auterement.

    Un immense merci pour "ce prêt d'organe".

    Bises d'ici!

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  2. je suis sincère et tout le plaisir est pour moi
    j'ai également de grands défauts entre autre je ne sais pas ne pas partager
    A toi de voir hahaha
    gros bisous

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  3. Je ne connais de la Mauritanie que ce désert si souvent survolé pour aller jusqu'à Dakar. J'avais alors envie de m'y poser, de le toucher, de m'y allonger, non pas pour me prélasser mais pour ressentir ce peuple qui vibre tant que même à plusieurs kilomètres d'altitude il ne me laissait pas indifférente.
    Je ne sais que dire.
    Je lis.

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  4. Je ne sais de la Mauritanie que ce qu'en disait ma grand-mère (blanche): à peu près rien, mais il y avait comme des étoiles dans ses yeux.
    Une chose: l'accueil, la "civilité" n'a rien à voir avec la civilisation, c'est sûr.

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  5. Cat & Sylvie: que vos commentaires sont émouvants et poétiques...j'aime!

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  6. Pas un klaxon de nos petis émois d'ici, tu nous fais réfléchir, remettre nos pendules à l'heure, le petit fait place au grand, nos manies à l'essentiel... Mille merci Lilia-aux-mots-justes...

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  7. Je prends connaissance de ce pays par tes yeux et je m'en réjouie. Je vais revenir pour continuer la lecture.

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  8. Lilia, Ce n'est sans doute pas la place, ici...ou ailleurs La poésie n'a pas de place...Le poète non plus.
    Je ne sais pas dire notre pays.
    Ton voyage enchanté est Mauritanien,le miens,est plus au Nord mais il rêve de sud.Je suis épuisé d'écriture. Il n'y a plus d'ombre, juste une lampe qui brille et qui me dit "écris lui, encore" alors voilà :

    Laisse les dire
    Les nuages passent

    La rivière chante comme le rosssignol
    Et le sang carminé

    Coule
    Dans mes veines

    Pour toi,étrangère à mon chant.




    Talisman

    Entoure ton âme
    d'un long ruban de brume
    Attend le passage
    Des oies sauvages
    Dans le ciel d'hiver
    Assise
    Face au soleil Levant

    Roger Dautais

    Je ne sais pas si ça avance les choses, ça les déplace mais la nuit est toujours là, longue, fatigante avec sa dictée, sa langue, son tempo, ses interdits, son limès, sa logorrhée, sa mélopée. Sous les pierres, le sable chaud nos rappele le jour. Avec tes mains, tu essaies de retenir ta Vie. Rien n'y fait, elle te file entre les doigts, comme moi. Nous sommes perdus par l'écriture.Cessons, ici ce soir,cet épuisement.
    Je tembrasse,encore une fois,
    Roger

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