jeudi 8 octobre 2009

C'est la faute du soleil si je suis encore suspendue à mon passé....






C'est la faute du soleil si je suis toujours suspendue à mon passé...

C'est la faute d'un soleil qui se lève toujours chaud comme pour brûler au mieux cette envie d'oublier et de ne plus rester seule avec mes souvenirs

SOUVENIRS SOUVENIRS répète éternellement en moi, in utéro une radio

Souvenirs du temps d'une rue du Mkass grouillante de gens de multinationalités la plupart analphabètes mais ouverts dans leur majorité ...

Je revois encore dans une mémoire fripée dans un angle de cette même rue ou juste derrière, la petite synagogue où je brûlais jadis un cierge effervescent d'espérances et de prières muettes puis courrais toujours dans cette même rue vers le fameux marchand de GILAT( une sorte de glaces traditionnelles) les meilleures que j'eusse jamais goûtées préparées avec science dans un tonneau rempli de fraises et de citrons et qu'il tournait majestueusement en chantant à la manière d'un tour de potier ....

SOUVENIRS SOUVENIRS répètent encore mon disco
souvenirs des jours heureux où espiègle je croyais encore au père Noël que je fêtais avec mes amies du quartier bint Etalyana (fille de l'italienne)ou encore celle de la maltaise et qui me laissaient accrocher sans gêne en haut de leur sapin une guirlande ou un cadeau

SOUVENIRS SOUVENIRS renchaîne mon cerveau qui zappe mon présent et revient sur cette terrasse où nous guettions en dizaine les étoiles et où nous hurlions à qui mieux mieux nos coings embaumant la girofle d'une main et de l'autre nous pointions le ciel et comptions les étoiles signant la fin du jeûne de Youm Kippour..
Puis la ruée hilare dans les escaliers pour retrouver des tables surdimensionnées en longueur dans nos folles petites têtes mais abondes en victuailles
Des tables seigneuriales pour des familles aussi modestes que les nôtres...

SOUVENIRS SOUVENIRS de cette voix chaude qui s'élève majestueuse dans le ciel encore rouge victime d'un soleil assassin...
Elle appelle à la rupture du jeûne de ce jour saint du mois de Ramadan alors je me vois me couvrir la tête d'un foulard ou d'un chiffon et me joindre à ma famille pour la prière du Mogrob(crépuscule)....

Mais pourquoi maintenant lorsque le cadran a dépassé le midi, mes années leurs printemps?

Comment expliquer cette ferveur pour garder les souvenirs qui ont taxé mon enfance toujours affluer et jamais muets?

Pourquoi ne suis -je jamais bien assise, toujours nostalgique boudant l'actuel comme un enfant gâté , magnifiant le passé comme un malade gâteux?

Pourquoi cet arrière goût en moi comme une chéloide indélébile?

Pourquoi cette réticence, ce regard rivé vers un hier qui devient flou ?

Je me cafarde dans mes ruminations profondes comme si je me plais dans ce malaise obscur.

En réalité, j'aime butiner dans ce jardin secret..
parcequ 'un air serein me manque où les enfants jouent ensemble main dans la main sans trop se soucier de couleur de peau, de rang ou d'appartenance!
parceque les identités ne sont pas meurtrières, les regards des mitraillettes, les appartenances une cravache qui laboure les vies écartant l'étranger, le différent comme un lépreux, un immonde,
un ennemi à abattre!
parce que l'holocauste a disparu certes, ses martyrs aussi mais il reste dans les cœurs, les esprits un autre modèle de four, de pilotis, de solution finale où les enfants sont élevés dans la haine du prochain :le juif , l'arabe, le noir, l'iranien, l'afghan, le....
La liste s'allonge chaque jour un peu plus tissée dans des toiles d'ignorance que nos politiciens gavent pour des enjeux strictement pernicieux.
Ma mère , la tienne , les autres ne sont peut-être plus tenues à beaucoup de choses certes mais que reste-il de cette étoile damnée qui a hanté ses jours et ses nuits certes un port pas du tout obligatoire, discriminatoire et douloureux mais tellement prisé par les jeunes de nos jours?
quels sens donnons-nous réellement à la kippa, le foulard ou la burkha une frontière , un mur, des cisailles pour déchirer les peuples et bannir les nations ou juste une conviction personnelle, un acte pieux?
quels regards posons-nous sur ces gens et quels regards abordent-ils eux-mêmes en nous regardant ?
Je commence à perdre le cours de mes idées ....
Je bafouille dans mes égarements.
Je bégaie en pensant aux réactions de ceux qui me liront.
Je trébuche en imaginant leurs interprétations.
Je transpire dans cette crainte et je ne me sens plus vrai
Pour cela, je préfère m'arrêter ...
Juste le mot de la fin, ma mère est encore plus belle avec ou sans son étoile gammée,
son foulard ou sa burkha
car la guerre ne légitimise aucune criminalité
et que c'est dans l'amour des autres qu'elle m'a élevée!

10 commentaires:

  1. Celle qui vous lit à l'instant...
    Ecoute, sent, vibre avec vos mots...
    Et j'ai la gorge serrée, en vivant ainsi vos SOUVENIRS SOUVENIRS...
    Merci...

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  2. Sujet controversé que j'aimerais tellement aborder avec quelqu'un qui sait de quoi il parle. Ce fût un plaisir de lire ce texte qui amène à la réflexion... merci Lilia.

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  3. bonsoir

    SE SOUVENIR , CELA FORCE LE RESPECT ...

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  4. Comme pour toi, Lilia, le passé résonne en moi comme un ostinato de plus en plus présent, de plus en plus imposant mais je réalise que c'est en lui que je trouve toute ma force.

    Comme la bonne terre dans laquelle est planté et puise le chêne centenaire, mon passé me permet de savoir qui je suis, ce que je veux, ce que je vaux, ce qui m'a nui et que je dois éviter, ce qui m'a fait grandir et que je dois conserver.
    Les pages de larmes et de douleurs de mon livre des souvenirs (certes moins inhumaines et moins destructrices que les tiennes) me font apprécier encore davantage les pages colorées, les mots doux, les lueurs du ciel et l'Autre, quand il sourit...
    J'aime mon passé et ne voudrait rien y changer et surtout pas ce qui me fit mal ou ce qui faillit me détruire car je ne serais pas celle que je suis aujourd'hui et qui trouve que la vie est belle.

    De tout coeur, mon amitié.

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  5. Fleuve d'amour que ce poème. Nuits d'airain, estuaire en déliquescence, bras ballants, le sang t'échappe et colore les eaux jusqu'à celles de ta naissance.
    Encore m'abreuver à ta douleur, encore m'enivrer de tes blessures, encore périr dans le four et rejoindre la Montagne sacrée d'os calcinés.
    De longues plaintes s'élèvent toujours, malgré le temps passé, des plaines Polonaises, de Sibérie, d'Argentine, pareilles à des prières dans la nuit noir dans la Nuit et Brouillard, confondus. Mais Dieu est mort, Dieu est mort à chaque seconde de l'holocauste. Mille mains par seconde ont griffé le ciel et les murs du Temple se sont effondrés sur moi. Mes larmes rejoignent le Jourdain , mais sera-ce suffisant pour sauver un lambeau de ma peau. Je te l'ai dit, ma soeur, nous sommes jetés aux chiens. La bête immonde est là, fille d'un borgne et d'une blonde platine. Basané, je suis et, manouche, gitan ou juif, arabe peut-être a moins que ce ne soit, tout à la fois, et basané je mourrai pour finir en cendres au pied d'un arbre. Ce n'est qu'une question de patience. Il faut dire et écrire cela, jusqu'au bout de nos forces.
    Ce poème pour toi

    J'ai perdu
    la sortie

    La partie se termine
    J'irai demain

    promis,
    creuser ma tombe.

    Roger Dautais, à Lilia, soeur méditerranéenne.

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  6. ton texte est sublime,je n ais pas de mot...

    http://unephotounsouvenir.blogspot.com/

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  7. J'aime ton écriture. Un texte très émouvant. Je vis moi aussi dans mes souvenirs comme pour arrêter le cours du temps. Je me pose aussi la question quel est le regard de ces femmes avec la burkha. A bientôt.
    Martine : http://www.cergyrama.com

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  8. Bonsoir Lilia,

    Je ne savais pas que tu avais ouvert un compte Blogger. Je suis ravie que "C'est la faute du soleil..." que j'ai publié il y a peu,te serve d'entrée en matière pour ce très beau texte que tu nous offres ici.
    A bientôt

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  9. comme je suis contente de te lire de nouveau
    oui j'ai remis le texte que j'avais écrit sur ton blog il y a un an et qq autres encore
    j'espère que tu reviendras
    bises

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